Décrypter un acte de naissance du XIXéme siècle pas à pas

acte de naissance du 19ème siècle

Pour tout passionné de généalogie, le XIXe siècle représente une période charnière, la première que l’on aborde après avoir épuisé les souvenirs familiaux.
C’est l’ère de l’état civil, solidement établi par le Code Napoléon, offrant une structure et une richesse d’informations remarquables.
Pourtant, malgré cette organisation, se pencher sur un acte de naissance de cette époque peut s’avérer intimidant. L’écriture manuscrite, avec ses pleins et ses déliés, les formules administratives d’antan et les détails parfois surprenants peuvent constituer de véritables obstacles. Cet article se veut un guide pratique et pédagogique pour vous accompagner, pas à pas, dans le déchiffrement et la compréhension d’un acte de naissance du XIXe siècle.

Armé de méthode et de quelques astuces, vous verrez que ces documents n’auront bientôt plus de secrets pour vous et deviendront des alliés précieux pour faire revivre vos ancêtres.

Le cadre légal et la structure immuable de l’acte

Contrairement aux registres paroissiaux plus anciens, dont la rédaction pouvait varier grandement selon le curé, les actes d’état civil du XIXe siècle sont très standardisés.
Depuis la Révolution et surtout l’instauration du Code civil en 1804, l’officier d’état civil (le maire ou l’un de ses adjoints) suit un canevas très précis. Cette uniformité est une aubaine pour le généalogiste.

Un acte de naissance de cette période se compose presque invariablement des parties suivantes :
1. Le préambule administratif : Il situe l’acte dans le temps et l’espace.
2. La comparution : Il s’agit de la présentation du déclarant.
3. La déclaration : C’est le cœur de l’acte, décrivant la naissance et l’enfant.
4. La présentation des témoins : Une obligation légale qui fournit des pistes supplémentaires.
5. La clôture et les signatures : La validation de l’acte.

En gardant cette structure en tête, il devient beaucoup plus facile de s’orienter dans le texte, même si l’écriture est difficile. Vous saurez instinctivement où chercher une date, un nom de parent ou la profession d’un témoin.

Analyse pas à pas d’un acte de naissance type

Pour illustrer notre propos, prenons un exemple concret : un acte de naissance de la commune de Saint-Denis, daté de 1875. Nous allons le décortiquer, phrase par phrase, pour en extraire toutes les informations.
(Note : L’exemple ci-dessous est une retranscription d’un acte authentique, choisi pour sa lisibilité et sa représentativité.)

• Préambule administratif« L’an mil huit cent soixante-quinze, le vingt-trois Janvier à dix heures du matin. »« Acte de Naissance de […], du sexe masculin. »« Par-devant Nous, Aimé-Désiré Legrand, adjoint au maire de la ville de St Denis (Seine), officier de l’état civil délégué. »
Décryptage :
◦ La date et l’heure de l’acte : La première information est toujours la date et l’heure de la rédaction du document, et non de la naissance. Ici, le 23 janvier 1875 à 10h. Les dates sont presque toujours écrites en toutes lettres, ce qui demande une certaine gymnastique de lecture.
◦ La nature de l’acte : Le type d’acte (« Acte de Naissance ») et le sexe de l’enfant sont souvent précisés en en-tête ou au tout début.
◦ L’officier d’état civil : Le nom et la fonction de la personne qui rédige l’acte sont indiqués. Cela nous renseigne sur l’administration de la commune à cette époque.

• La Comparution« A comparu le sieur Louis-Alexandre Martin, âgé de trente-deux ans, profession de Journalier, demeurant à St Denis, rue du Landy, 65. »
Décryptage :
◦ Le déclarant : Il s’agit de la personne qui vient déclarer la naissance en mairie. La loi imposait que cette déclaration soit faite dans les trois jours suivant l’accouchement.
◦ Informations sur le déclarant : On apprend son nom, son âge (32 ans), sa profession (« Journalier », un ouvrier agricole ou non spécialisé payé à la journée) et son adresse précise. L’adresse est une information capitale pour imaginer le cadre de vie de la famille et peut être croisée avec les registres de recensement.

• La Déclaration« Lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin, né hier à six heures du soir, en son domicile, de lui, déclarant, et de son épouse Marie-Louise Durand, âgée de vingt-huit ans, sans profession. »« Auquel enfant il a déclaré vouloir donner les prénoms de Jules, Ernest. » Décryptage :
◦ La date et l’heure de naissance : C’est ici que l’on trouve la date exacte de la naissance : « hier à six heures du soir », soit le 22 janvier 1875. L’heure de naissance est une information souvent présente au XIXe siècle.
◦ Le lieu de naissance : La naissance a eu lieu « en son domicile ». À cette époque, la majorité des accouchements se faisaient à la maison.
◦ L’identité des parents : Le déclarant est le père. L’acte nous donne également le nom complet de la mère, son âge (28 ans) et sa profession (« sans profession », ce qui était courant pour les femmes mariées).
◦ Les prénoms de l’enfant : L’enfant reçoit les prénoms de Jules et Ernest. Fait intéressant à noter pour le XIXe siècle : le prénom usuel n’était pas forcément le premier de la liste. Il n’est pas rare de retrouver un ancêtre connu sous son deuxième ou troisième prénom dans d’autres documents.

• La présentation des témoins« Lesdites déclaration et présentation faites en présence des sieurs Pierre Dubois, âgé de quarante-cinq ans, profession de Charron, et Jean Dupont, âgé de cinquante-deux ans, profession de Tonnelier, tous deux demeurant à St Denis et amis du déclarant. »
Décryptage :
◦ L’obligation de témoins : La présence de deux témoins majeurs était obligatoire.
◦ Des informations précieuses : L’acte nous livre leurs noms, âges, professions et domiciles. La mention de leur lien avec le déclarant (« amis ») est un plus, mais souvent, les témoins sont des membres de la famille (oncles, cousins, beaux-frères), des voisins ou des collègues. Identifier les témoins et rechercher leurs propres actes peut permettre de reconstituer le cercle social et familial de vos ancêtres.

• La clôture et les signatures« Et ont les déclarant et témoins signé avec Nous, après que lecture du présent acte leur a été faite. »[Signatures de L.A. Martin, P. Dubois, J. Dupont, et A.D. Legrand]
Décryptage :
◦ La lecture de l’acte : Cette formule finale atteste que l’officier a bien lu l’acte aux parties présentes avant signature. ◦ Les signatures : La présence ou l’absence de signatures est un indicateur du niveau d’alphabétisation. Si une personne ne sait pas signer, l’officier l’indique par la mention « a déclaré ne savoir signer ». Dans notre exemple, tous savent signer, ce qui témoigne d’une certaine instruction.

Conseils pratiques pour le déchiffrement : la paléographie à votre portée

La principale difficulté reste souvent l’écriture manuscrite.
Au XIXe siècle, bien que l’enseignement de l’écriture se soit standardisé, chaque officier d’état civil avait son propre style.
1. Ne vous focalisez pas sur un seul acte : Si vous peinez sur un mot, lisez les actes précédents et suivants rédigés par le même scribe. Vous vous familiariserez avec sa façon de former les lettres, ses tics d’écriture, ses majuscules caractéristiques.
2. Repérez les mots connus : Entraînez-vous à identifier les mots qui reviennent systématiquement : « L’an », « le », « âgé de », « profession de », « demeurant à », « en présence de »… Une fois que vous les lisez sans effort, vous pourrez les utiliser comme « pierre de Rosette » pour déchiffrer les lettres qui composent les noms propres.
3. Attention aux lettres piégeuses : Les « s » et les « f » se ressemblent souvent, tout comme les « u » et les « v », ou encore les « i » et les « j ». Les majuscules peuvent être très ornementées et déroutantes. N’hésitez pas à comparer une lettre difficile avec la même lettre dans un mot que vous avez déjà identifié.
4. L’orthographe fluctuante : Même au XIXe siècle, l’orthographe des noms de famille n’est pas toujours fixée. Un « Martin » peut s’écrire « Martain » dans un autre acte. Soyez souple et ouvert aux variations.
5. Les abréviations : Elles sont plus rares que dans les registres paroissiaux, mais subsistent. La plus courante concerne les mois de fin d’année : « 7bre » pour septembre, « 8bre » pour octobre, « 9bre » pour novembre et « Xbre » pour décembre.
6. Utilisez les outils numériques : Les visionneuses des sites d’Archives départementales permettent de zoomer, d’améliorer le contraste et la luminosité. N’hésitez pas à jouer avec ces réglages pour faire ressortir l’écriture.

Décrypter un acte de naissance du XIXe siècle est une compétence qui s’acquiert avec la pratique. Chaque document déchiffré est une victoire, une porte qui s’ouvre sur une parcelle de vie de vos ancêtres. En procédant avec méthode, en comprenant la structure de l’acte et en vous armant de patience face à l’écriture, vous transformerez rapidement ces documents d’apparence austère en récits familiaux passionnants.

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